Depuis 10 ans, date de la création du Défenseur des enfants, première autorité administrative indépendante chargée de défendre et de promouvoir les droits des enfants, Claire Brisset puis Dominique Versini rendaient public un rapport chaque fois consacré à une question particulière liée à la protection de l’’enfance en France.

L’’article 36 de la loi organique du 29 mars 2011 précise que c’’est à présent au Défenseur des droits de rendre public « un rapport consacré aux droits de l’’enfant à l’’occasion de la journée internationale des droits de l’’enfant ».

Ce rapport intitulé « Enfants confiés, enfants placés : défendre et promouvoir leurs droits » aborde cette année la thématique des enfants accueillis en institution.

Actuellement, près de 148.000 enfants et adolescents, en France, ne vivent pas avec leur famille. Au titre de l’’intérêt supérieur de l’’enfant, ils sont confiés ou placés. Parmi eux, 48.600 sont aujourd’hui accueillis en institution.

Ce rapport préparé par mon adjointe, Marie Derain, Défenseure des enfants, propose de faire un bilan des droits des enfants accueillis en institution.

Dominique BAUDIS

Le Défenseur des droits…

Le Défenseur des droits est une autorité constitutionnelle indépendante qui veille au respect des droits et des libertés par toute personne, privée ou publique.

Le Défenseur des droits est chargé de défendre et de promouvoir l’’intérêt supérieur et les droits de l’’enfant consacrés par la loi ou par un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, comme la Convention internationale des droits de l’’enfant (CIDE).

Le 20 novembre 1989, cette Convention est adoptée à l’’unanimité par l’’Assemblée générale des Nations unies. A travers 54 articles la Convention reconnait des droits fondamentaux à tous les enfants du monde. La France l’a ratifiée en août 1990.

Il est inscrit dans la loi du 29 mars 2011 que le Défenseur des droits remet au Président de la République, ainsi qu’’au Président de l’’Assemblée nationale et du Sénat un rapport consacré aux droits de l’’enfant. Le rapport 2011 intitulé « Enfants confiés, enfants placés : défendre et promouvoir leurs droits » est consacré aux enfants placés dans les institutions.

Sur proposition de Dominique Baudis, le Premier ministre a nommé en qualité de Défenseure des enfants Marie DERAIN, Adjointe et Vice-présidente du collège chargé de la défense et de la promotion des droits de l’’enfant.

Marie DERAIN a occupé des fonctions à la Protection Judiciaire de la Jeunesse au Ministère de la Justice. Elle a exercé des responsabilités dans une association d’’éducation populaire. Elle a notamment participé au rapport sur la situation des mineurs étrangers isolés en France.

Qui peut saisir le Défenseur des droits lorsque l’’intérêt supérieur d’’un enfant ou l’’un de ses droits n’’est pas respecté ? Comment le saisir ?

Le Défenseur des droits peut être saisi par :

Un enfant qui invoque la protection de ses droits ou une situation mettant en cause son intérêt, son représentant légal, un membre de sa famille, un service médical ou social, une association de défense des droits de l’’enfant

Sa saisine est directe et gratuite.

Par voie postale :

7 rue Saint-Florentin – 75409 Paris cedex 08

Tél. : 01 53 29 22 00

Par voie électronique : www.defenseurdesdroits.fr

Histoires vécues

Respect par l’’Aide sociale à l’’enfance des souhaits émis par l’’enfant placé

Un père de quatre enfants, Gaspard, 17 ans, Nathan, 16 ans, Gaëlle 13 ans, et Armand, 11 ans, a alerté le Défenseur des droits sur ses difficultés à maintenir des liens avec ses enfants dont l’’aîné était confié à l’’Aide sociale à l’’enfance. Ses droits de visite et de correspondance avaient été suspendus par le juge des enfants du fait des angoisses manifestées par les enfants lorsqu’’ils le rencontraient. Ce père estimait que ses difficultés étaient dues, d’une part à des manipulations des enfants par leur mère dont il était séparé et qui s’’employait à rompre le lien « père-enfants » et, d’’autre part à la partialité des services sociaux.

Les éléments recueillis par les services du Défenseur des droits ont montré que le juge des enfants avait placé Gaspard dans un foyer à cause de problèmes de comportement qui s’étaient accentués lors de la séparation des parents. Une enquête sociale indiquait que Gaspard refusait de voir son père car il avait beaucoup souffert de son comportement. Son père, en effet, l’’avait utilisé pour surveiller sa mère qu’’il avait beaucoup dénigrée, voire menacée devant lui. L’’adolescent aurait également été le témoin de bagarres violentes dans des bars entre son père et d’’autres personnes, une alcoolisation du père étant évoquée.

Bien que suivi par un psychologue, la souffrance de l’’adolescent l’’empêchait encore d’’être en contact avec son père. L’’Aide sociale à l’enfance, tout comme le juge des enfants, avaient décidé de respecter le souhait de l’’adolescent, d’’autant que le père persistait dans son refus de collaborer avec les services sociaux. A ce jour, ce dossier est toujours en cours d’’instruction. Le Défenseur des droits visait à faire prendre conscience à ce père que l’’éloignement correspondait à la protection et à l’’intérêt de l’’enfant.

Non respect par le Conseil général des obligations légales (lois 2002 et 2007) de documents d’’information pour les parents et les enfants

La mère de David, 13 ans, et Victor, 11 ans, confiés à l’’Aide sociale à l’’enfance, signalait au Défenseur des droits l’’absence de contrat de séjour ou contrat d’’accueil ainsi que de documents individuels de prise en charge pour ses enfants, ce qui ne répondait pas aux obligations de la loi du 2 janvier 2002 et de la loi du 5 mars 2007.

Interrogé par les services du Défenseur des droits, le Président du Conseil général leur précisait que les documents relatifs à la mise en œuvre de la loi du 02 janvier 2002 (livret d’accueil, contrat de séjour, et document individuel de prise en charge) avaient été validés en décembre 2010 et devaient d’’ores et déjà être mis en œuvre.

La Direction de l’’Enfance, de l’’Adolescence et de la Famille devait en outre travailler durant l’’année 2011 à la mise en œuvre prioritaire du projet pour l’’enfant prévu par la loi du 5 mars 2007.

Cette demande reflétait l’’angoisse de cette mère de ne pas disposer d’informations suffisantes sur la vie quotidienne de ses enfants et sur les projets envisagés pour eux, auxquels d’’ailleurs elle aurait dû se trouver associée comme l’’intervention du Défenseur des droits a pu le mettre en évidence.

Blog de parent mécontent attentatoire à l’’intimité de l’’enfant

Le père de Clara, 17 mois, contestait les décisions judiciaires prises en faveur de sa fille. Selon lui, il existait des « dysfonctionnements politico-judiciaires » dans le traitement de sa situation en raison des difficultés rencontrées avec la mère de l’’enfant. Il n’’avait pas pu voir Clara depuis cinq mois. Il avait donc créé son blog sur internet sur lequel il avait publié, entre autres, les décisions de justice, afin de faire connaître largement son point de vue et d’’exposer tous les éléments d’’information qu’’il estimait utiles à la compréhension de sa situation.

Les services du Défenseur des droits ont expliqué à ce père que publier sur ce blog accessible à tous l’’intégralité des décisions de justice apparaissait attentatoire à l’’intimité de sa fille, conformément à l’’article 16 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant. Bien que mécontent de cette recommandation, le père a retiré ces décisions de son blog.

Droit à être protégé contre les violences

Aurélien, âgé de 16 ans, dénonçait lui-même auprès du Défenseur des droits le comportement discriminant et les violences qu’’il avait subi du fait de son homosexualité, de la part des autres jeunes accueillis dans son foyer éducatif que, par conséquent, il souhaitait quitter. Aurélien se montrait très perturbé par cette situation, ajoutant que cette forme de violence psychologique, qui s’’ajoutait à la violence maternelle à l’’origine de son placement lui était insupportable.

Le service éducatif confirmait aux services du Défenseur des droits la virulence des autres jeunes, à un point tel que l’’établissement avait isolé Aurélien dans une chambre individuelle. Le jeune homme était suivi régulièrement par psychologue de l’’établissement.

Les personnes présentées comme ses agresseurs avaient été déplacées dans un autre foyer ; elles y attendaient de comparaître devant le tribunal pour les faits de violence qui leur étaient reprochés. Aurélien, lui, était maintenu dans l’’établissement avec un nouveau projet de formation qui le satisfaisait. L’’intervention du Défenseur des droits a rappelé aux équipes la nécessité que le projet de service soit attentif aux diverses manifestations de violences.

Maltraitances commises par un éducateur spécialisé

La présidente d’’une Fondation a alerté le Défenseur des droits sur la situation de plusieurs enfants âgés de 5 à 11 ans, qui lui étaient confiés. Ils avaient en effet été victimes d’actes de maltraitances physique et psychologique de la part d’un éducateur spécialisé. Une procédure de licenciement avait immédiatement été engagée, mais l’’éducateur étant délégué syndical, son licenciement était soumis à l’autorisation préalable de l’inspection du travail. Celle-ci avait refusé cette autorisation et demandait que l’’éducateur soit réintégré, sous peine de poursuite pénale pour entrave aux fonctions de représentant du personnel. Un recours hiérarchique avait été intenté par la Fondation devant le Ministre du Travail afin de contester cette décision. Parallèlement, un signalement avait été fait au procureur de la République.

Les services du Défenseur des droits sont intervenus auprès du ministre du Travail afin que, au nom de l’intérêt supérieur de l’enfant, il suspende, durant la procédure judiciaire, la décision de réintégration prise par l’inspecteur du travail. En réponse, le ministre du Travail a annulé cette décision et autorisé le licenciement de cet éducateur.

Droit aux relations avec les grands-parents

Gabin, 8 ans, et Inès, 5 ans, dont la filiation paternelle n’a pas été établie, ont été confiés à l’’Aide sociale à l’’enfance et sont hébergés en foyer car leur mère ne peut pas s’’occuper d’eux. Leur grand-mère maternelle bénéfice d’un droit de visite et d’’hébergement assez élargi qui, pourtant, a été contesté et restreint depuis qu’elle souffre de problèmes de santé. Cette grand-mère s’’adresse alors au Défenseur des droits parce qu’elle aurait beaucoup de difficultés à exercer son droit de visite et d’’hébergement alors que son petit-fils n’irait pas bien et que elle estime nécessaire de conserver le lien avec la famille maternelle et son histoire. Elle demande un retour à des droits de visite et d’’hébergement élargis, souhaite participer davantage à la vie des enfants notamment en recevant des informations sur leur scolarité et leur santé, élément particulièrement important car la famille souffrirait d’’une affection héréditaire.

Les services du Défenseur des droits sont entrés en relation avec ceux de l’’Aide sociale à l’’enfance ; des contacts étroits ont également été établis entre la grand-mère et le délégué territorial du Défenseur des droits. A la suite de quoi, l’’Aide sociale à l’’enfance a désigné de nouveaux référents pour les enfants, la grand-mère s’’est vu proposer des aménagements dans le but manifeste de trouver un meilleur équilibre entre la nécessité de maintenir des liens familiaux en raison de l’’absence de leur mère et l’’intérêt des enfants. Les problèmes de santé de l’’aîné ont semblé mieux pris en compte et la grand-mère en a été mieux informée. L’’Aide sociale à l’’enfance a été avertie du souhait de Gabin de passer une partie des vacances d’’été chez sa grand-mère.

Bien que Gabin soit toujours en difficulté, la situation évolue vers une meilleure collaboration avec les services de l’’Aide sociale à l’’enfance et une meilleure participation de la grand-mère à la vie de ses petits-enfants.

« Rapport annuel 2011 consacré aux droits de l’enfant »

Agenda

25 novembre

Signature d’un protocole de coopération avec le parquet de Montpellier

23 novembre

Intervention de l’’Ecole nationale de la magistrature à Bordeaux. Déplacement de la Défenseure des enfants à Bruxelles : Réunion de la plateforme européenne sur les droits de l’’enfant organisée par la Commission européenne sous la présidence de la Viviane Reding

22 novembre

Remise du rapport sur les droits de l’’enfant à Bernard ACCOYER, Président de l’’Assemblée nationale

21 novembre

Remise du rapport consacré aux droits de l’’enfant au président de la République par le Défenseur des droits et la Défenseure des enfants

20 novembre

Présentation de la stratégie du Conseil de l’’Europe pour les droits de l’’enfant à Monaco (Marie Derain)

18 novembre

Remise publique du rapport consacré aux droits de l’’enfant au Président de la République. Rencontre avec le président du Conseil général de la Seine-Saint-Denis et visite d’’un foyer éducatif d’’Aulnay-sous-Bois

17 novembre

Rencontre avec le tribunal de Bobigny sur la problématique des mineurs isolés étrangers et visite de la plateforme de la Croix-Rouge française

16 novembre

Rencontre de la Défenseure des enfants avec le Conseil communal des Jeunes d’’Issy-les-Moulineaux

15 novembre

Rencontre avec M. Christian WHALEN, Ombudsman des enfants du Nouveau-Brunswick (Canada)

14 novembre

Rencontre nationale des 450 Délégués territoriaux

09 novembre

Réunion du collège « Défense et promotion des droits de l’enfant »

09 novembre

Rencontre avec M. Evguevni BOUNIMOVITCH, Médiateur des droits de l’’enfant de Moscou