Prix 2011 de la Fondation CHIRAC pour la prévention des conflits à Marguerite BARANKITSE et Louise ARBOUR…

Pour sa troisième édition, le Prix de la fondation Chirac distinguera deux personnalités qui « ont su discerner dans l’aveuglement de la haine, les hommes et les femmes qui pouvaient se parler, celles et ceux qui ont pu dissiper à temps les malentendus. » Jacques Chirac, cérémonie de remise du Prix, 5 novembre 2010 Monsieur Kofi Annan, Prix Nobel de la Paix, Ancien Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies remettra, en présence des membres du Jury, et de l’artiste Youssou N’Dour :

– Le Prix de la fondation Chirac pour la prévention des conflits à Marguerite Barankitse pour son action en faveur des enfants victimes des conflits au Burundi. Fondatrice de la Maison Shalom, de la Cité des anges et de l’hôpital Rema, elle recueille depuis 1994 des orphelins hutus, tutsis et twas, victimes de la guerre civile qui a éclaté en 1993 et a fait plus de 250 000 morts. L’accès à l’éducation, à la culture et aux soins permet aux enfants de se reconstruire et c’est ainsi que naît une nouvelle génération de citoyens tournés vers la paix.

Ce Prix doté de 100 000 euros va lui permettre de poursuivre son action en faveur de la réconciliation au Burundi.

– Le Prix Spécial du Jury à Louise Arbour, ancien procureur du Tribunal pénal international (TPI) pour l’Ex-Yougoslavie et du TPI pour le Rwanda, pour son action en faveur de la Justice internationale. Ses nombreuses initiatives, notamment les « actes d’accusations scellés », inculpations gardées secrètes contre les criminels de guerre, les auteurs d’actes de génocide, qu’ils soient haut responsables politiques ou militaires, et la sensibilisation des médias au travail du TPI ont largement contribué à renforcer la justice internationale. Les inculpations prononcées aujourd’hui par la Cour pénale internationale témoignent de ce processus désormais inéluctable.

Cérémonie de remise du Prix jeudi 24 novembre 2011, à 10h00, au musée du quai Branly à Paris, -Théâtre Claude Lévi Strauss

Entrée 218, rue de l’Université ou 37, quai Branly, Paris 7e

LES MEMBRES DU JURY DU PRIX

Boutros Boutros-Ghali, ancien Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies

– Michel Camdessus, ancien Directeur général du Fonds Monétaire International

– Jacques Chirac, Président de la fondation Chirac

– Joaquim Alberto Chissano, ancien Président de la République du Mozambique

– Federico Mayor, ancien Directeur de l’UNESCO

– Jorge Sampaio, ancien Président de la République du Portugal

– Ismaïl Serageldin, Directeur de la Bibliothèque d’Alexandrie

– Simone Veil, Ancien Ministre d’Etat, membre de l’Académie Française.

– Vaira Vike-Freiberga, Ancienne Présidente de Lettonie

Cérémonie de remise du Prix Jeudi 24 novembre 2011 à 10h30

En présence de Monsieur Kofi Annan, Prix Nobel de la Paix, ancien Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies

Et de Youssou N’Dour,artiste et ambassadeur de bonne volonté de l’Unicef, et de la FAO, membre du Comité d’honneur de la fondation Chirac

Musée du quai Branly,

Théâtre Claude Lévi-Strauss

Entrée 218, rue de l’Université, Paris 7 e

FE R M E T U R E  D E S    P O R T E S A 1 0 H 1 5

Jury présidé par Monsieur Jacques Chirac, ancien Président de la République, Président de la fondation Chirac :

• Monsieur Boutros Boutros-Ghali, Secrétaire général de l’ONU de 1992 à 1996

• Monsieur Michel Camdessus, Directeur général du Fonds Monétaire International de 1987 à 2000

• Monsieur Joaquim Alberto Chissano, Président de la République du Mozambique de 1986 à 2005

• Monsieur Federico Mayor, Directeur général de l’Unesco de 1987 à 1999

• Monsieur Jorge Sampaio, Haut représentant du Secrétaire général des Nations Unies pour

l’Alliance des civilisations, Président de la République portugaise de 1996 à 2006

• Monsieur Ismaïl Serageldin, Directeur de la Bibliothèque d’Alexandrie

• Madame Simone Veil, Ancien Ministre d’État, membre de l’Académie Française

• Madame Vaira Vike-Freiberga, Présidente de la République de Lettonie de 1999 à 2007

La fondation Chirac remercie pour leur généreux soutien le Cheikh Sabah Al-Ahmad Al-Jaber Al-Sabah,

Emir de l’Etat du Koweit ; Monsieur Khalil Abdulwahab Al Bunnia, Président-Directeur général du groupe Al Bunnia et Monsieur Ousmane Sow, créateur de l’œuvre remise aux lauréats.

Programme

La cérémonie est dirigée par Patrick Simonin, rédacteur en chef à TV5 Monde

10h15  Fermeture des portes

10h15 Présentation audiovisuelle des actions de la fondation Chirac

10h30 Mots d’ouverture par Monsieur Stéphane Martin, Président directeur général du musée du quai Branly

10h35 Mots d’accueil de Monsieur Michel Camdessus, Directeur général du Fonds Monétaire International de 1987 à 2000

10h45 Interview croisée de Mario Giro et de Monsieur Mahammadou Issoufou, Président de la République du Niger

10h55 Discours de Monsieur Kofi Annan, Prix Nobel de la Paix, ancien Secrétaire général des Nations Unies

11h05 Présentation vidéo sur l’action de Madame Marguerite Barankitsé

11h10 Remise du Prix de la fondation Chirac pour la prévention des conflits à Madame Marguerite Barankitsé

11h25 Diffusion de la vidéo sur le travail de Madame Louise Arbour

11h30 Remise du Prix Spécial du Jury à Madame Louise Arbour

11h40 Remerciements et conclusions par le Maître de Cérémonie

11h45 Prestation sur scène de Youssou N’Dour et de ses musiciens ou diffusion du clip contre les faux médicaments.

11h50 Séance photo

12 h00 Clôture de la cérémonie La cérémonie sera retranscrite en direct de 10h30 à 12h sur

www.fondationchirac.eu

Le Prix de la Fondation Chirac pour la prévention des conflits

Dans un monde fragilisé par les déséquilibres écologiques, les crises économiques, les injustices sociales et les tensions communautaires ou confessionnelles, les facteurs de conflits sont nombreux et leur complexité s’accentue. Agir pour que ces tensions ne dégénèrent pas en conflits est bien souvent un travail de terrain lent et dangereux.

Pourtant, de nombreux hommes et femmes de bonne volonté qui, partout dans le monde, œuvrent dans la discrétion, et souvent en prenant des risques pour leur vie, afin de briser les dynamiques de conflit.

Quand il était Secrétaire général des Nations Unies, Boutros Boutros-Ghali avait déjà voulu faire de la prévention des conflits une catégorie à part entière de l’action internationale dans son Agenda pour la Paix (1992).

Aujourd’hui, le Prix de la fondation Chirac pour la prévention des conflits veut améliorer la notoriété de ces initiatives et les soutenir.

La fondation Chirac s’appuie sur un Comité d’experts qui identifie les zones de conflits potentiels. Après y avoir recensé les actions en faveur de la prévention des conflits, ce Comité propose au Jury une liste de personnalités ou d’institutions qui ont contribué à créer un processus de dialogue entre belligérants. Le Jury, composé de personnalités ayant œuvré pour la paix, remet ensuite à deux lauréats, pour l’exemplarité et l’urgence de leur action :

• le Prix de la fondation Chirac, remis à une ou des personnes de la société civile et doté de 100 000 euros.

• le Prix Spécial du Jury, remis à une ou des personnalités publiques.

Les experts du Prix pour la prévention des conflits se sont attachés en 2010/2011 à se concentrer plus particulièrement sur certaines zones de tension, en tenant compte de trois critères de sélection.

D’une part, l’agenda politique national et international de la zone, qu’il risque de déstabiliser la situation actuelle et les belligérants, ou qu’il ouvre une opportunité particulière de faire avancer les efforts de construction de la paix.

D’autre part, l’éloignement géographique et médiatique de la zone, souvent peu connue des opinions occidentales et de leurs dirigeants.

Enfin, l’intérêt des facteurs de paix dans la zone et des projets développés pour rapprocher les communautés, qui pourraient singulièrement inspirer les efforts de la communauté internationale.

L’intérêt des experts s’est penché cette année sur dix zones plus particulières : la région des Grands Lacs africains, le Soudan, la Colombie, le Brésil, la région du fleuve Mano, le Moyen-Orient et la Transcaucasie.

Ces zones ont permis de dégager des sujets d’action particulièrement innovants, objets de réflexion sur les racines des conflits, leur lien avec l’État de droit, le dialogue interculturel, le rôle des femmes dans la prévention des conflits, le droit foncier, le développement urbain ou l’aménagement du débat politique local.

En 2009, le Prix de la fondation Chirac a récompensé l’Imam Muhammad Ashafa et le Pasteur James Wuye pour leurs efforts de réconciliation inter-communautaire au Nigeria, et l’ancien Ministre de l’Unification de Corée du Sud, Park Jae-Kyu.

En 2010, le Prix de la fondation Chirac a récompensé Mario Giro, responsables des relations internationales de la Communauté Sant’Egidio, pour ses médiations en Côte d’Ivoire, en Guinée et au Niger, et l’ancien Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations-Unies, Lakhdar Brahimi.

Marguerite Barankitse Fondatrice de la Maison Shalom (Burundi), pour son action en faveur des victimes des conflits ethniques au Burundi

Marguerite BARANKITSE

BIOGRAPHIE

Marguerite BARANKITSE, connue sous le nom de Maggy, est née en 1956 dans la région de Ruyigi, une province de 60 000 habitants à l’est du Burundi.

Cette femme tutsie, enseignante de formation, a été récompensée à plusieurs reprises pour son action en faveur de la paix. Elle est souvent comparée à Nelson Mandela, avec qui elle partage cette même volonté de pardon et de réconciliation interethnique.

La ferveur de son engagement au service de la paix naît lors des affrontements tragiques entre hutus et tutsis au Burundi en 1993.

A la suite des exactions interethniques perpétrées au lendemain de l’assassinat de Melchior Ndadaye, le premier Président hutu élu démocratiquement au Burundi, Maggy se réfugie avec plusieurs enfants à l’évêché de Ruyigi. Elle y sera témoin du massacre de 72 personnes. Elle parvient in extremis à sauver 25 enfants qu’elle adoptera avec la volonté de leur procurer une réelle « éducation à la paix ».

Depuis Maggy recueille des milliers d’orphelins de guerre, hutus et tutsis confondus et a créé une ONG pour leur venir en aide. Son statut de mère adoptive lui vaut le surnom de « femme aux 10 000 enfants » et sa dévotion inébranlable celui de « Mère Teresa africaine ».

PRESENTATION DU CONFLIT BURUNDAIS

Le Burundi, né de la scission du Rwanda-Urundi, accède à l’indépendance le 1er juillet 1962.

Cette indépendance marque le début de trente années d’instabilité politique au cours desquelles le pays est sinistré par la violence interethnique.

L’ONU classe le Burundi parmi les huit pays les plus pauvres au monde : la proportion de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté est passée de 33,8 % en 1993 à 67,4 % en 2001 et l’espérance de vie, réduite par le sida, ne dépasse pas 39 ans. A cela s’ajoute une densité de population favorisant les conflits pour l’accès à la terre (234 habitants du km2 en 1993, 341 habitants au km2 aujourd’hui), facteur de violence alors que les Tutsis ont été longtemps favorisés pour l’accès à la propriété.

En 1993, Melchior Ndadaye, le premier président hutu à être élu démocratiquement, est assassiné par des officiers tutsis. Débute alors une série de violences interethniques où s’affrontent hutus (85 % de la population), tutsis (14 %) et twas (1 %), qui fait plus de 250 000 morts. Certains assassinats de tutsis par les hutus sera qualifiée « d’actes de génocide » en 1996 par une commission d’enquête de l’ONU.

Le 28 août 2000, le gouvernement légal du Burundi et les rebelles burundais signent, sous l’égide de Nelson Mandela, un accord de paix à Arusha en Tanzanie qui prévoit une période de transition. Le processus de paix s’accélère en 2003 avec le ralliement de la principale rébellion hutue, le CNDD-FDD(Conseil National pour la Défense de la Démocratie).

Cependant, cette trêve n’empêche pas la résurgence de violences ethniques. Le 24 août 2004, 160 réfugiés tutsis congolais d’origine rwandaise sont assassinés par les rebelles burundais hutus du FNL(Forces Nationales de Libération). Il faut attendre 2005 pour qu’un cessez-le-feu aboutisse et que le Burundi s’engage enfin sur le chemin de la paix. En février 2005, le Burundi adopte une nouvelle constitution par référendum permettant la tenue des élections législatives et présidentielles après deux reports successifs du calendrier. De nouvelles élections se sont tenues au Burundi de mai à septembre 2010, auxquelles les forces d’opposition ont refusé de participer. A leur suite, de vives tensions se font ressentir entre le Président reconduit Pierre Nkurunziza et son opposition.

Selon l’International Crisis Group, ces tensions pourraient dégénérer violemment dans les prochains mois, ruinant la crédibilité du processus électoral et mettant en péril une démocratie fragile et les nombreux acquis du processus de paix.

« La haine n’aura pas le dernier mot : Maggy, la femme aux 10 000 enfants », Christel Martin, Ed. Albin Michel Rapport d’avancement – Objectifs du Millénaire pour le Développement, PNUD, septembre 2004 Statistiques de l’OMS en 2003.

PRÉSENTATION DE LA MAISON SHALOM

C’est dans ce contexte tumultueux que Marguerite Barankitse, qui refuse toute récupération politique et continue de parler franchement sans épargner le gouvernement, se bat pour réconcilier les hutus et les tutsis, en apprenant aux enfants de toutes les ethnies à vivre ensemble.

La Maison Shalom :

En 1994, Maggy fonde la Maison Shalom à Ruyigi, une province à l’est du Burundi. Cette ONG burundaise, non confessionnelle et politiquement neutre, accueille les enfants que la guerre civile a séparés de leurs familles, qu’ils soient hutus, tutsis ou twas. Egalement centre d’apprentissage et dispensaire, cet orphelinat les éduque à la fraternité et à la paix.

Le contexte d’urgence dans laquelle s’inscrivait l’action de la Maison Shalom pendant la guerre civile a laissé place à la reconstruction et au développement d’une paix durable. Ainsi Maggy et son équipe, composée d’une centaine d’assistantes sociales, d’éducatrices, de psychologues et d’infirmières, agissent aujourd’hui sur différents fronts :

o accès à l’éducation et apprentissage d’un métier,

o accès aux soins (avec l’ouverture de l’hôpital Rema en 2008),

o accès à la culture (au sein de la Cité des anges).

Lorsque la réinsertion dans une famille proche ou lointaine est impossible, la Maison Shalom rachète des terrains sur lesquelles elle construit des habitations qui deviennent de vraies maisons pour les enfants âgés de 4 à 22 ans, sous la responsabilité attentive des aînés. Dès 2000, Maggy, aidée par un avocat, a mis en place un système d’héritage pour les orphelins : lorsque les enfants grandissent, ils deviennent propriétaires des maisons.

De nombreuses activités génératrices de revenus ont été mises en place pour et par les jeunes sous la supervision de la Maison Shalom : une boulangerie, un salon de coiffure, un atelier de couture, plusieurs fermes, un atelier de mécanique, un garage, une pharmacie et une guest house.

Néanmoins, l’apprentissage de la paix et du pardon reste la clé de voûte des actions de la Maison Shalom.

La Cité des anges – pour renforcer l’accès à l’instruction :

Dans un pays où 80 % de la population est analphabète, l’accès à l’éducation et à la culture est le meilleur rempart contre la haine. Initiée en 2002 par Maggy à Ruyigi, la cité des anges se veut une enclave culturelle offrant aux enfants un espace éducatif et ludique.

La cité propose entre autres une bibliothèque, un centre d’éveil consacré à la petite enfance, un atelier de tricot et de crochet pour sourd-muet, un atelier artisanal pour aveugle et un atelier d’initiation et de formation aux technologies multimédias créé en partenariat avec l’IUT de Marne la Vallée. Ces projets s’inscrivent tous dans la démarche d’éducation à la paix de la Maison Shalom : permettre aux enfants de s’ouvrir au monde et aux différences.

La pièce maîtresse de cet îlot culturel est « Le Cinéma des anges » créé en 2003 par Thierry Nutchey, réalisateur français, grâce à l’aide de « la Maison des Anges », association française fondée en 2002 pour mener le projet. Ce cinéma est aujourd’hui la seule salle de projection du Burundi en dehors de celles construites dans la capitale.

Le développement de ces activités culturelles contribue à désenclaver la région de Ruyigi et à faire de cette province, longtemps considérée comme dangereuse, une zone de plus en plus attrayante comme en témoignent le projet de création d’une école internationale et l’installation récente de succursales de trois banques.

L’hôpital Rema :

En 2008, Maggy inaugure l’hôpital REMA. Cet hôpital dédié à la mère et l’enfant a pour mission principale la réduction de la mortalité maternelle et infantile à Ruyigi. Il assiste aussi les malades du Sida, mais, avec sa capacité de 100 lits, il ne peut faire face aux demandes de plus en plus nombreuses de prise en charge.

Le projet de création d’une école d’infirmières de niveau A2 (4 ans après le tronc commun de l’école secondaire) est en cours.

Une culture de Paix :

La « Maison Shalom », signifie « maison de la paix ». Aujourd’hui, elle est moins une institution qu’un lieu de passage permettant à des milliers d’enfants hutus, tutsis et twas de se construire un avenir et de contribuer à la construction de leur nation.

Les tout premiers enfants accueillis par Maggy participent aujourd’hui activement aux missions de la Maison Shalom et les dupliquent dans d’autres régions du Burundi. Ils sont devenus à leur tour des messagers de paix, de pardon et d’espoir et ce cercle vertueux né de l’action de Maggy permet de neutraliser les facteurs de conflits de l’intérieur.

L’action de Maggy ne se limite pas aux 650 000 orphelins de guerre. Elle aide aussi les enfants dont les parents sont morts du sida (230 000 au Burundi) et les personnes fragilisées par les conflits. Les femmes violées sont soignées et entourées, d’anciennes femmes rebelles et d’anciens massacreurs apprennent à se réintégrer dans la société, les enfants soldats bénéficient d’un suivi psychologique et apprennent un métier.

Maggy est aussi médiatrice de la paix : à la demande du Haut Commissariat aux réfugiés, elle se déplace dans les villages du Burundi pour poursuivre la réconciliation entre hutus et tutsis.

Marguerite Barankitse a réussi à créer une nouvelle génération de jeunes citoyens qui ne se veulent ni hutu, ni tutsi, ni twa mais « hutsitwa », luttant ainsi contre une « ethnicisation » de la vie politique et publique au Burundi.

Chronologie

Octobre 1993 : Assassinat de Melchior Ndadaye, premier Président hutu élu démocratiquement au Burundi. Début de la guerre civile. Maggy adopte 25 enfants hutus et tutsi ayant échappé au massacre auquel elle a assisté au sein de l’évêché de Ruyigi.

6 avril 1994 : Le 6 avril, les Présidents rwandais et burundais par intérim sont victimes d’un attentat. Le Rwanda sombre dans un génocide (Entre 800 000 et 1 million de personnes disparaissent).

1994 : Maggy crée la Maison Shalom, l’ancienne école du diocèse prêtée par l’évêque de Ruyigi.

1995 : Les rebelles attaquent Butezi (15 km de Ruyigi) : Maggy récupère des locaux de la coopération italienne et crée « La casa de la pace », 70 à 80 enfants y séjournent pendant 5 ans. En 2000, cette maison de la paix est fermée pour des raisons de sécurité.

1995-2000 : L’aide internationale parvient enfin à Ruyigi : une équipe de psychologues, assistantes sociales et éducateurs se constitue autour de la Maison Shalom.

1998 : Maggy reçoit aux côtés d’une dizaine de personnalités, dont le Dalaï Lama et Rigoberta Menchu Tum, le Prix des droits de l’Homme décerné par la France dans le cadre du 50ème anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.

2000 : Fragiles accords de paix signés à Arusha entre le gouvernement légal du Burundi et les rebelles, avec l’aide de Nelson Mandela.

2000 : Maggy reçoit le Prix Nord-Sud du Conseil de l’Europe.

2003 : Ralliement au processus de Paix de la principale rébellion hutue, le CNDD-FDD.

2003 : Création du « cinéma des anges ». Maggy reçoit à Stockholm le World’s Children’s Prize for the Rights of the Child, aussi appelé « Prix Nobel des enfants », ainsi que le prix de la défense des personnes déplacées décerné par la Commission Espagnole d’aide aux Réfugiés.

2004 : Le 24 août, 160 réfugiés Tutsis congolais d’origine rwandaise sont assassinés par les rebelles burundais hutus du FNL. La Maison Shalom accueille 1 000 réfugiés rapatriés dans la région de Ruyigi par le HCR.

2005 : Le nombre d’enfants bénéficiant de façon directe ou indirecte de l’aide de la Maison Shalom est estimé à 20 000.

2008 : Inauguration de l’hôpital Réma. Maggy reçoit l’Opus Prize d’une valeur de 100 000 $ décerné par l’université de Seattle et la Opus Prize foundation.

2009 : Rama Yade, Secrétaire d’État aux Droits de l’Homme, remet, au nom de la République française, la médaille de chevalier de la Légion d’honneur à Maggy (citée en 2007).

Janvier 2012 : Mise en place espérée de la Commission Vérité et Réconciliation prévue par les Accords d’Arusha (2000), qui sera ensuite suivie par la mise en place d’un Tribunal spécial.

Louise ARBOUR

 

LOUISE ARBOUR

Pour son action afin de renforcer la Justice internationale, en tant que premier Procureur du Tribunal pénal pour l’Ex-Yougoslavie et du Tribunal pénal pour le Rwanda

BIOGRAPHIE

Louise Arbour est née en 1947 à Montréal. Juriste, elle a été membre de la Cour Suprême du Canada (1999 à 2004), et Haut-Commissaire de l’ONU pour les Droits de l’Homme de 2004 à 2008.

Elle a surtout été le premier Procureur en chef du Tribunal pénal international pour l’Ex-Yougoslavie (TPIY) et du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) de 1996 à 1999. Les TPI pour l’Ex-Yougoslavie et le Rwanda ont été créés respectivement par les résolutions 808 (en 1993) et 955 (en 1994) du Conseil de sécurité de l’ONU. Instruments pénaux internationaux nouveaux, ils sont destinés à juger et punir les responsables de génocides, crimes contre l’Humanité et crimes de guerre commis durant les conflits dans ces régions.

En 2009 elle a succédé à Gareth Evans comme Président de l’International Crisis Group.

LE TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

Le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) poursuit et juge les personnes coupables de violations graves du droit international humanitaire sur le territoire de l’ex-Yougoslavie durant les guerres en Croatie, en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo. Son siège est situé à La Haye au Pays-Bas. Depuis la tenue de sa toute première audience, le 8 novembre 1994, le TPIY a mis en accusation 161 personnes.

En 2011, il restait deux accusés en fuite. Ratko Mladi!, ancien chef militaire des Serbes de Bosnie, responsable du massacre de plus de 7 000 morts à Srebrenica en 1995. Il a été arrêté le 26 mai 2011.

Le dernier fugitif, Goran Hadzic, responsable du massacre de Vukovar en novembre 1991 perpétré par les forces serbes et assassinant 264 Croates et non Serbes, a été arrêté à son tour le 20 juillet 2011.

LE TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL POUR LE RWANDA

Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) a été mis en place le 8 novembre 1994 par le Conseil de sécurité des Nations Unies afin de juger les personnes responsables d’actes de génocide et d’autres violations graves du droit international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda, ou par des citoyens rwandais sur le territoire d’États voisins, entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994. Son siège est à Arusha en Tanzanie.

LES INNOVATIONS DETERMINANTES DE LOUISE ARBOUR EN TANT QUE PROCUREUR

En tant que premier Procureur nommé pour les Tribunaux pénaux internationaux pour l’Ex-Yougoslavie et le Rwanda, Louise Arbour a apporté des innovations majeures qui ont permis à la Justice internationale de s’affirmer contre l’esprit d’impunité.

Innovations dans le droit :

Par des « actes d’accusations scellés », Louise Arbour a pu procéder à de nombreuses arrestations avant que celles-ci soient empêchées par des interventions hostiles. Ces inculpations gardées secrètes ont permis de réduire les risques de représailles contre ceux qui procédaient aux arrestations ; le cadre juridique établi pour ces arrestations maintenait les autorités locales en dehors du processus.

Cela permit par la suite à Louise Arbour de demander directement aux forces de l’OTAN, qui en avaient les moyens militaires et juridiques, d’appréhender un certain nombre de suspects ayant fait l’objet d’une inculpation gardée secrète et de surmonter les hésitations politiques qui pouvaient nuire à l’action du Tribunal pénal international.

L’arrestation de l’ancien maire de Vukovar (Croatie) le 27 juin 1997 : l’ancien maire de Vukovar, Slavko Dokmanovic, ignorait qu’il était inculpé pour le massacre de 273 Croates et non-serbes, lorsqu’il fut arrêté par des soldats polonais commandés par un administrateur de l’ONU.

Mise en accusation des hauts responsables :

Louise Arbour a très vite tenu à se concentrer sur les grands responsables militaires et politiques des « nettoyages ethniques » : c’est ce qui l’a amenée à signer les actes d’inculpation de Slobodan Milosevic en avril 1999 ou de Jean Kambanda, en 1997.

Consciente que des négociations de paix pourraient permettre à Slobodan Milosevic d’échapper à la justice, Louise Arbour a fait confirmer secrètement l’acte d’accusation et l’a gardé sous scellés, le temps de se rendre elle-même à Bonn, Londres, Washington, Paris et Bruxelles et de rencontrer chacun des ministres des Affaires étrangères concernés, leur rappelant leur engagement public en faveur du droit pénal international.

L’inculpation de Milosevic fut un moment historique qui eut des répercussions politiques bien au-delà de la Serbie.

Cette innovation institutionnelle a consolidé le caractère répressif du TPIY, les pouvoirs du Tribunal se sont élargis, et le droit pénal international a renforcé ses positions. L’arrestation de Ratko Mladic, le 26 mai 2011 en Serbie, rappelle combien l’opiniâtreté du Procureur du Tribunal pénal international a été déterminante afin que la justice n’oublie jamais.

Sensibilisation des opinions publiques :

Le troisième axe de la stratégie de Louise Arbour consista à s’appuyer sur la presse internationale afin de médiatiser son action, et permettre au TPIY de bénéficier d’un large soutien dans l’opinion : « Cela m’a pris un certain temps, mais j’ai fini par prendre conscience de deux caractéristiques traditionnelles fondamentales de l’action pénale : c’est quelque chose de public et c’est quelque chose qui se passe près de chez vous (…) À l’échelle internationale, la seule manière pour nous de retrouver cette publicité et cette proximité, c’était de se servir des médias internationaux. Il fallait y être présent ».

Elle s’efforça dans cette perspective de faire ressortir trois aspects du TPIY, à savoir :

o sa compétence extraterritoriale l’emportait sur la revendication de souveraineté ;

o son caractère répressif, et non diplomatique ;

o son rôle est de réprimer en temps réel et non de porter des jugements longtemps après les faits.

Lorsque 45 corps abattus peu de temps auparavant furent découverts en janvier 1999 à Racak au Kosovo, Louise Arbour voulut se rendre sur place. Mais elle ne fut pas autorisée à franchir la frontière en Macédoine malgré des négociations avec Milosevic. Les médias rendirent compte de l’affrontement. Toute cette médiatisation servit les 3 thèmes définis par Louise Arbour : un procureur du TPIY se voyait interdire d’approcher du lieu d’un crime récemment commis, et cette interdiction venait d’un chef d’État qui invoquait la souveraineté nationale pour dissimuler des indices.

Le rapprochement entre l’Union européenne et les Balkans occidentaux

Le premier Sommet UE / Balkans occidentaux s’est tenu à Zagreb en 2000, sous l’impulsion de Jacques Chirac, alors Président du Conseil européen. La coopération avec le Tribunal pénal international a figuré parmi les conditions sine qua non de rapprochement entre Serbie, Montenegro, Albanie, BosnieHerzégovine et Croatie, et l’Union européenne. Les arrestations récentes des deux derniers accusés en fuite, Ratko Mladi! et Goran Hadzic devraient permettre à la Serbie de faire un pas vers le statut de candidate à l’Union.

Les autres conditions retenues pour la mise en place d’accords de stabilisation et d’association avec les États des Balkans occidentaux étaient : la réconciliation, la liquidation des contentieux bilatéraux, le renoncement aux irrédentismes, le respect des minorités, le retour des réfugiés et des personnes déplacées et la coopération régionale.

Ces conditions ont conduit les pays issus de l’ex-Yougoslavie à se résoudre à donner des informations permettant l’arrestation de criminels de guerre et à poursuivre leurs efforts de coopération avec le tribunal.

Aujourd’hui, la Slovénie est membres de l’UE, et la Croatie est en voie de rejoindre l’UE en 2013. La Macédoine et le Montenegro ont le statut de pays candidat, tandis que l’Albanie et la Serbie ont déposé leur demande à obtenir ce statut en 2009